Intentions de mise en scène

La Bête et la Belle

Sensualité et Sexualité. Des préoccupations au centre de nos relations sociales. Ces rapports humains nous font vivre, ils nous obsèdent, ils nous transcendent. Les corps respirent, transpirent. Les corps subliment, ils se tendent, s’apaisent. Les corps offrent, les corps reçoivent et demandent. Les corps sont le creuset de toutes ces énergies qui nous rendent vivants. Encore faut-il pouvoir les cultiver ces énergies, ces émotions si nécessaires.

Comment permettre à nos corps de vivre nos émotions dans nos sociétés puritaines, où un ordre moral veut s’imposer ? À vouloir tellement les contraindre avec un zèle et une autorité terrifiante, les corps ne vivent plus ou vivent n’importe comment. On se désole des ravages de la pornographie et on critique les modes de vie des sociétés traditionnalistes tout en condamnant la sexualité… Combats, certes menés souvent à raison. Mais au lieu de s’acharner à hurler sans cesse contre tout cela, en voulant imposer à une société tout entière des normes, n’est-il pas urgent de libérer les pensées et d’accepter la diversité tout en s’attaquant aux causes d’un mal être corporel flagrant ?

Les énergies corporelles ne circulent pas librement entre les êtres parce qu’on ne veut pas apprendre aux plus jeunes comment les faire circuler. On ne veut pas leur donner les outils pour qu’ils puissent se comprendre, qu’ils puissent comprendre l’autre et ainsi créer des relations bienveillantes et épanouissantes. Ou si peu.

Aujourd’hui, chez les adolescents, se tenir par la main ou le frôlement de deux corps est obligatoirement le résultat d’une pensée perverse ou tout du moins déplacée ! Situation désastreuse qui ne génère que frustrations, incompréhensions, fantasmes. Alors pour faire bonne figure, on porte de multiples masques. Tandis que dans l’ombre, on ne maîtrise rien et les situations dégénèrent : violences sexuelles, abus, irrespect du corps de l’autre et de son propre corps…

La Belle et la Bête est trop souvent résumée comme étant une histoire sur la rédemption. Si la Belle se résout à se porter prisonnière, il ne faut pas oublier que la Bête ne redevient prince que parce que la jeune femme choisit de revenir. Le conte nous explique que la libre acceptation est une condition fondamentale et que le respect et l’entente mutuelle sont nécessaires à l’épanouissement d’une sensualité et d’une sexualité saines.

Alors, avant de brandir les épouvantails de toute sorte et de déclarer avec autorité la liste des interdits, il est temps de montrer à nos enfants que les relations humaines sont belles, que la sensualité est belle, que la sexualité est belle, quand elles se vivent avec respect, librement, sans arrière-pensée malsaine. Que les rapports entre les êtres sont beaux quand ils sont entrepris dans l’unique objectif du bonheur, du plaisir et du bien-être.

Guillaume De Moura